Sur un simple coup de tête
pour chasser fatigue et soucis
je pars en balade en baleine
dans son ventre végétal
meublé d’un canapé de plancton
la canopée de mes pensées
compose une salade
savant mélange
de ballades garnies
je chantonne quelques couplets
assaisonnés du geste et du refrain
dans un rot, la baleine me régurgite
‘bah, j’ai dû toucher la luette’
l’heure est venue de rentrer : « hep ! »
je surfe sur le dos d’un merlin taxi
tous mes sens sont éblouis
gifles du sel
bris bruyants du soleil
cris des oiseaux sur l’ennemi
charges du vent
toutes voiles dehors
volant
dans les plumes des oiseaux
vols à l’arraché
par boîtes de flocons
d’un bal entier de valses de duvet
je siffle : « les oiseaux sont mes amis ! »
il me hurle aux oreilles
me pousse à l’eau
cette fois, c’en est trop
j’ouvre les yeux, relève la tête
échoué sur mon canapé
fatigue et soucis sont partis
à l’écran de ma fenêtre
un quartier tout entier de la lune
est resté allumé
dans les grésillements de la nuit
de la neige cathodique balaye
les quatre saisons de mon insomnie
image : dimitrisvetsikas1969 sur Pixabay
La mission
Bravo, petit !
cet air hilare et satisfait
pour un bout d’œuvre inachevée :
un gros soleil en haillons rouges de rayons
sourire banane au rouge à lèvres
je vois que tu prends déjà ta vie en main
tu l’écris en rayons de couleurs
tu la rayes de mots bleus
tu rayonnes de joie
tes rires en résonnent
mais sache que sur ce chemin
tu n’auras que tes mots nuageux
serrant de rage une plume en haleine
si tu te suis sur ce chemin
tu seras pointé du doigt
par tous ceux
qui n’ont pas d’encre sur les mains
et par les autres
qui ont largué leurs rêves en route
ta carrière est toute tracée
aux crayons de soleil
c’est une carrière de poisson rouge
de pêcheur de mots de mer
ton cadre à toi, ta branche
c’est l’infini de l’océan à perte d’horizon
l’horizon perdu
rejeté en mer par les pêcheurs de mots déchus
les mots poissons
tous les déçus
ton devoir, ta mission si tu l’acceptes
c’est l’impossible
c’est de le peindre pour eux
suspendu en acrobate
sur le fil des couleurs
mais attention, petit
sur ces chemins d’infortune
ils sont déjà nombreux
les clochards habillés de gâché
à mâcher des regrets de papier
en fait
si tu refuses de grandir
si tu t’enfuis sur cette route
tu n’en reviendras pas
tu seras étonné
et tant qu’à faire
puisses-tu n’en jamais revenir
et puiser la force de cultiver la grâce
pour semer quelques nuages en route
quitte à les perdre de ta poche
et tu sais quoi ?
à force d’être étonné
tu n’en finiras plus
d’être formé d’étonnements
(Image : un soleil souriant sur Paintingvalley)