Un jour, comme ça
par accident, juste en fouillant
ce quelque chose que je cherchais
je ne sais quoi exactement
je l’ai trouvé dans ma chute
du haut de sa chambre
le carnet était gentiment fermé
à l’ombre du miroir intime
d’un tiroir de son « je »
tapis dans le maquis de bric et de broc
de stylos bic et bracelets toc
d’une pie d’argent, braque
s’entrouvrant
le carnet s’est mis tout seul à briller
en une féerie d’instants froissés
naïves et spontanées
des notes flûtées d’alphabets parfumés
s’envolaient légères au vent des feuilles
au milieu de gribouillis
et gargouilles égrabouillées
où des calligraphies serrées
se calibraient en équilibre
sur chaque page jusqu’au dernier
les pleins carreaux craquaient
de lettres souples
roulées en délivrance
à l’orée des 16 ans
d’une chercheuse d’étoiles
dès le début, d’ailleurs
c’était de l’art et du cochon
bourré de fautes d’or tôt graffées
en agrafes aux syllabes des accents
et il n’était question
que d’amour dans les prés
ou un bel en beau brut
se vautrait de désir
sur son pâmé pont des soupirs
mais ses yeux à elle
s’organisaient en résistance
ils révulsaient pour refuser
les derniers ravages du plaisir
dans la bascule du néant
aux ultimes convulsions
qui la sombraient
par contre
pour les sciences autres
que la chimie fusionique
la géographie des corps unis
ou les langues musicales des baisers
pour la physique, les maths classiques
pour les abscisses même désordonnées
aucune faute d’or, de taux, de graphes
pas la moindre fausse note, rien
pas même un ridicule néant abyssal
le carnet s’éteignait dans le vide
je le rangeai à l’abri d’un vrai vrac
de braquages aux brocantes
où chaque chose ou machin
était l’indispensable truc
de broc bruc et d’argent
enfin, je m’éclipsai
sur la pointe des pieds
image : Kelly Cookson sur Flickr